« La vie au fond des yeux » un roman attachant
2018-06-08 11:43:40
Coécrit par un écrivain pas comme les autres
Notre département a la chance d’avoir accueilli voici quelques semaines un haut fonctionnaire doublé d’un écrivain de talent. Il s’agit de Nicolas Quillet préfet de la Sarthe dont nous avions salué la prise de fonction le 9 mars dernier. Mais aujourd’hui c’est l’homme de plume qu’Ilatou souhaite vous présenter.
Comme un certain nombre d’entre vous j’ai découvert en leur temps les ouvrages de « ministres écrivains » - je pense en particulier à Jean-François Deniau, auteur de nombreux romans dont « Le Grand jeu » - ou encore de « diplomates écrivains » tel que Jean-Christophe Ruffin (ancien ambassadeur de France au Sénégal et en Gambie) auteur notamment de « Rouge Brésil » Prix Goncourt 2001. Cette fois il s’agit d’un préfet écrivain. Il faut dire que les études de Nicolas Quillet à l’Ecole Normale Supérieure le prédestinait à l’écriture et à devenir un homme de lettres aussi surement que son passage à l’ENA (promotion Léonard de Vinci) lui assurait l’accès à la haute fonction publique. Sous le pseudonyme de Manuel Cordouan, il est l'auteur de pas moins de cinq romans et deux pièces de théâtre. Par ailleurs, il a signé de son vrai son nom deux essais dont « Regards européens sur l’histoire franco-allemande » récompensé par le prix de l’Académie des sciences morales et politiques.
Un récit plein de poésie
Son dernier roman Manuel Cordouan l’a écrit à quatre mains avec Hélène de Vannoise. Il s’agit d’un très beau récit, plein de poésie et de sensibilité comportant de magnifiques portraits psychologiques empreints de pudeur des deux personnages. Pierre et Isabelle sont en quête désespérément du bonheur, un peu à la façon de « Un homme et une femme » du cinéaste Claude Lelouch. En soi la rencontre amoureuse entre une femme mariée et son amant divorcé n’a rien d’original sauf que dans ce roman le mari d’Isabelle s’invite de façon fantomatique et quasiment subliminale au fil des pages. Et pour cause, Xavier est devenu tétraplégique à la suite d’un étrange accident de voiture et qu’il est hospitalisé à Garches. Ce ménage à trois, singulier, laisse planer tout au long du livre une atmosphère pesante et comme les auteurs ont su ménager un suspense insoutenable jusqu’à la dernière page nous nous garderons bien de déflorer l’intrigue de « La vie au fond des yeux ».
Un climat sous tension
Sur la forme, le procédé d’écriture retenu par Manuel Cordouan, et Hélène de Vannoise emprunte à la fois à la technique de la caméra embarquée avec son objectif inquisiteur et au journal intime qu’entretiendrait régulièrement les deux personnages, à la façon de deux comédiens se donnant la réplique sur scène. Il en résulte une plongée vertigineuse dans la vie d’Isabelle et de Pierre qui se mettent à nu en exhibant leur passion amoureuse faite de fragilité, de tendresse, d’émotion, de doutes et de peur. Du coup nous devenons les spectateurs impuissants d’un drame de la jalousie qui se noue sous nos yeux. Assurément « La vie au fond des yeux » pourrait faire un très beau scénario de film avec derrière la caméra pourquoi pas, un certain Claude Lelouch.
J.Y.D
La vie au fond des yeux – Ella éditions, 253 pages – Prix : 19 €
Pour suivre demain : L'interview de Manuel Cordouan
Ilatou-Sarthe